Fin de soirée étrange. [Ayu Horrow] [28/08/2009]

Ca partait en vrille. Mais complètement... Et j'aimais ça... J'adorais ça. J'aurais vendu ma peau pour vivre dans ce genre de délire complètement barge que je ne contrôlais en rien du tout. En fait, c'était un peu comme si j'étais défoncée. Je n'avais pas vraiment eu d'époque "drogue" mais j'avais eu une époque assez difficile, après ma mort... J'avais un peu touché à tout, avant de remonter la pente...

Et là, c'était exactement le même effet qu'avant. Que quand je me piquais le bras gauche, jamais le droit, celui-ci me donnait la nausée... J'avais totalement perdu tout contrôle de la situation. Et j'en venais à me demander si j'en avais eu le contrôle à un moment quelconque depuis qu'il m'avait parlé sans conviction... Bon, je l'avais suivi, très bien, mais : Pourquoi? Je l'avais suivi parce que je voulais le tuer, mais pourquoi je n'avais pas fait ça dans la rue? Oh mon Dieu... Ma tête.

C'était peut-être lui qui m'avait drogué... C'était fréquent dans les sauteries illégales... Mais quand? Pourquoi? Comment? Avec quoi? S'il m'avait piqué, il était très fort... Je n'avais rien senti... Bon, Shemhazaï, reste calme. il y a des gens ici. Ils te sauvront si jamais tu es dans la merde... Mais bien sûr... Ils ne me sauvront que dalle. C'est déjà fort que ce type, qui fait apparement partie de la resistance ne t'ai pas reconnue, mais ils te sauteront dessus et ils l'aideront à te tuer, si ça tourne mal....

- Mais dans quoi j'me suis fourée, moi... murmurais-je, n'entendant plus ma propre voix.

Suite à ça... Cette phrase, lâchée, murmurée, soufflée, inaudible, avait fait l'effet d'une soupape. Je me sentais mieux. Je perdais cette sensation que tout allait au ralenti et que j'allais en acceléré... Mon cerveau reprennait son rythme normal et je pouvais de nouveau m'entendre penser, et par conséquent m'ignorer. Tout allait mieux.

On passait devant la secrétaire, qui semblait amusée et dégoûtée de cet "Ayu". Mais pourquoi je lui avais demandé son nom à l'autre? J'm'en tapais royalement de son identité. Elle ne bossait pas vraiment. Je découvrais ainsi que mon bonhomme semblait avoir la Tchatche. Bon je dis : "semblait" parce que je le trouvais trop insolent et pas assez sarcastique pour m'interesser à ce qu'il disait. La secrétaire poussa un soupir et se remit à faire semblant d'être occupée.

En tout cas, il n'avait pas peur. il avait même l'air très sûr de lui. Et je n'aimais pas ça. Ca me redonnait le même tournis que précédement. Il me manipulait, mais je n'arrivais pas à saisir pourquoi... Qu'est-ce que ça pouvait bien apporter à un môme d'être vu avec une chose assez indistincte (quand même, j'avais le type gothique, sans véritablement l'être et je tenais autant de la prostituée que de l'élève modèle...) au travail?

Il me menait par le bout du nez dans les locaux et cette soirée me paraissait plus que malsaine... J'étais heureuse. S'il avait eu plus l'air d'un adulte, je crois que j'aurais pu l'épouser... Quoi que non : je l'aurais tué comme les autres. Parce que si j'avais voulu l'épouser, c'est Seth qui l'aurait massacré, et en y prenant du plaisir, s'il vous plait.

Bon, un bureau. J'esperais que c'était le genre d'endroit calme où personne ne viendrait le déranger... J'aurais peut-être le temps de le tuer et de me tirer par la porte de derrière avant que la Rebellion (pardon, la Resistance) ne sonne l'alerte et ne rameute tous ces soldats dans ce bureau étroit. Je le regardais fermer la porte, en m'asseyant sur son bureau (enfin, j'esperais que c'était le sien, parce que sinon, le propriétaire allait me donner une fessée... Quoi que...).

J'avais quand même l'étrange surprise de me sentir genée... Je n'avais pas l'habitude, je n'avais plus l'habitude, de me retrouver seule avec un homme, qui, à priori, avait prévu de me sauter... J'essayais de le masquer, et calculant bien mes mots, mon ton, mon intonation, je parlais....

- Et maintenant?

Oui, bon, c'était court mais expressif hein !

Aaaaah, Shem, Shem, il te tend une perche ! me cria mon esprit, sans avoir au préalable mon autorisation écrite, signée par les cinq départements différents de ma raison (l'Intelligence, la Ruse, la Folie, la Psychose et la Folie : les trois derniers étant strictement les mêmes, en fin de compte...) et renvoyée au cerveau... Je haïssais ça : quand un monologue se mettait à s'installer dans ma tête...

Mais le fait était qu'il me tendait bel et bien une jolie perche. Ca m'aurait parfaitement ennuyé de l'avoir suivi jusqu'ici pour devoir me la jouer : jeune fille polie et perverse. Enfin, après le silence qui s'était installé entre nous, je me mettais à attendre le bon moment. Le bon moment entre lui et moi, pour planter mon regard dans le sien, laisser mes crocs se découvrir d'eux-mêmes et former un rictus sadique des plus admirables... C'était ma grande spécialité, face au commun des mortels, les effrayer....

Et ce moment arriva bientôt. Je réussis à capter son regard, après qu'il ait contempler l'état de la pièce, qui était assez indescriptible, même pour une fanatique du gore dans mon genre... Mon regard rouge, plutôt intimidé, changea de nuance... Le rouge prit une couleur plus... Hypnotique. L'air geignard à l'intérieur devînt plus.... Malsain... Oui, je le dévorais des yeux, comme si c'était un steak et que je n'avais pas mangé depuis quatre jours : et tant pis s'il était froid, j'allais me le faire quand même. C'était un peu l'expression que j'avais à ce moment là. Mais il y avait du soulagement, dans mon regard. Ca faisait du bien de pouvoir arrêter de jouer un rôle et redevenir moi-même. Mon regard tenait aussi du remerciement : en me soulageant, il me débarrassait d'un poids... Mon expression mélangeait ces trois impressions, mais ce n'était pas tout... Il y en avait une quatrième, indescriptible, que moi-même, je n'avais jamais réussi à interpréter mieux que de la folie pure.

Je me levais de son bureau, évitant, sans même les regarder, les ordures et déchets qui jonchaient le sol comme un champ de bataille. Au moins, j'avais un scoop : au Quartier Général de la résistance (si c'était bien là que je me trouvais), ils n'avaient pas de femmes de ménages... Ou alors Ayu devait les harceler pour qu'elles ne foutent pas les pieds dans ce bureau. Je fis un petit pas vers lui, mon sourire s'agrandissant inversement proportionnellement que la distance qui me séparait de lui... J'avais les lèvres aux oreilles.

- Waouh, t'es plus perspicace que tu n'en donnes l'impression !

Saloperie de voix. Si je n'arrivais plus à la contrôler elle, j'étais mal barrée dans la vie (je suis mal barrée dans la vie de toute façon, je sais...). Sur le coup, j'avais parlé avec un ton joyeux et ça me hérissait les poils des avants bras. Et puis, je voulais être sarcastique, alors ça n'allait vraiment pas ! Pour reprendre mon sérieux, je glissai mon majeur et mon annulaire droit dans la poche qui renfermait mon rasoir et le sortait de là.

- Tu sais, reprenais-je, avec ma voix macabre habituelle, les jeunes filles dans ton genre ne devraient pas traîner dans des endroits aussi glauques que les quais, la nuit... Elles pourraient tomber sur des vilaines personnes...

Sarcastique au possible. Pour renforcer l'effet désagréable de ma voix sur lui, j'ouvris mon rasoir. Il produisit son habituel et journalier feulement, grincement, crissement strident. J'adorais ce son. La lame métallique qui frottait contre le bois du manche avant de couper l'air avec une rapidité, une dextérité et une force que je ne trouvais nul part ailleurs... La plupart des gens, ça leur vrillait le cerveau assez longtemps pour que je puisse les égorger... Mon cerveau repassait le film de ma vie de démone psychotique pendant que ma voix, toujours aussi cynique et sadique continuait de se foutre de la gueule de ma future victime : Ayu Jsaisplustropquoi.

- Ta gentille maman ne t'a jamais appris à ne pas parler aux dames que tu ne connaissais pas? Je ne sais pas où est-ce qu'elle pouvait bien se planquer (ni avec qui elle le faisait) quand elle aurait du t'apprendre cela, mais, c'est bien dommage... Tu vas l'apprendre à tes dépends.

Pendant que j'avais soufflé cette dernière tirade, j'avais fait le tour de ma proie, sans lui tourner le dos (je n'étais pas complètement dingue non plus... Quoi que, si, mais bon...) et fermé la porte à clef. Il pourrait toujours sortir par la fenêtre ou défoncer la porte, mais ça rajoutait un côté mélodramatique (que je trouvais volontiers comique) à cette scène...

- Ma mère couchait avec à peu près toute la société angélique lors de soirées échangistes... C'est p't'être là qu'elles se sont rencontrées, répliquais-je, sans sembler insultée par cette déclaration : en fait, je ne l'étais pas le moins du monde.

Un défi? Trop la classe... Pour une fois que quelqu'un ne partait pas en courant et en pleurant en voyant mon arme. Je souriais, j'étais contente. Enfin quelqu'un qui en avait dans le pantalon et que je ne détestais pas non plus pour autant... Manquait plus que Seth dans la même pièce et là, j'aurais vraiment eu une bonne raison d'être heureuse... Oui, je pouvais paraître bizarre, mais j'm'en foutais... Mais alors complet.

Le seul problème, ou plutôt : le gros problème (parce que même si je ne le reconnaîtrais jamais, je savais que suivre des gens dans leur bureau en leur faisant croire que je serais prête à coucher avec eux uniquement pour pouvoir les égorger : c'était un problème en soi. Et assez grave, de prime) c'était que le bureau était petit, premier souci, mais surtout qu'il était en bordel et que c'était pas pratique pour bouger dans ces conditions... Je ne tenais pas à glisser sur des résidus de... Urk, qu'est-ce que c'est que ce truc par terre?! et le voir me massacrer par la suite. C'était tout ce qui me bloquait dans ce combat. Mais bon, il serait aussi handicapé que moi, c'était déjà ça...

Une fois de plus, mon corps opéra sans demander l'avis du cerveau qui semblait occupé à dormir, et ma main droite décrivit un arc de cercle autour de la tête du gamin. Mon rasoir fusa, une fois, près de sa tempe gauche. Le but n'étant pas de lui arracher un bout de cerveau dans la foulée (d'ailleurs, sauf s'il décidait de bouger plus vite que moi, ma lame ne l'atteindrait pas) mais surtout de le faire réagir, de le décontenancer, de le frustrer en quelque sorte... Même si je me rendais de plus en plus compte qu'il me serait difficile de le mettre en mauvaise posture.

À adolescent et demi, adolescente et demie, comme aurait pu dire mon cher Adamsberg (voir "Dans les bois éternels" Fred VARGAS). A priori nous avions le même gabarit, la même stature... Nous devrions avoir donc les mêmes chances de tuer l'autre... Et le pire dans tout cette histoire, c'était que ni l'un ni l'autre n'essayait de calmer le jeu pour sauver sa peau... Vraiment, j'adorais cette soirée. Je me demandais même si je ne l'adorais pas lui aussi. Une sorte d'amour... comment dire? Fraternel... En quelque sorte, mais c'était bien pire que ça : je l'aimais parce que je savais que j'allais bien rigoler en lui tapant sur la gueule. Je sais : je suis une pourriture.

Suite à mon coup de rasoir, je bondis. Je n'avais nullement envie de rester sur place à le regarder me défoncer la mouille à grand coups d'une arme encore inconnue dans la tronche. Sadomaso, okey, mais j'avais des limites, hein... Dans mon mouvement, je sautai sur le bureau, accroupie, tous les muscles de mon corps tendus, prêts à se déplier d'un grand coup sec, telle la machine infernale que j'étais. Le bureau me paraissait bien, à cause du rebord qu'il pouvais se prendre s'il voulait me frapper, parce qu'il était surélevé et que je pouvais donc frapper le haut de son corps, d'un coup de pied si jamais il se rapprochait assez...

De mon côté, il y eut deux réactions à l'explosion du bureau... Ce qui est étrange, c'est que ni l'une ni l'autre ne coïncidaient... Je ne sais pas comment je fis, mais je le fis bel et bien. C'était parfaitement improbable et impossible... Un peu comme quand une de mes connaissances avait fait un chantier et qu'elle était partie en roulé boulé dans la montagne, un rocher de quarante-cinq kilos qui lui fonçait dessus, avec sur son trajet des pierres affûtées et des pics métalliques et qu'elle avait réussi à faire un salto arrière non contrôlé, à quatre-vingt-dix degré vers le droite, en tombant... Un énorme coup de bol doublé d'une bonne dose de réflexes surhumains... Et là, c'était quasiment la même chose.

Première réaction :
Son pouvoir était vraiment bluffant. J'aurais presque voulu le même... Mais je me demandais quand même où on pouvait bien trouver ce genre de pouvoirs... Quel magasin?... Combien ça coûtait?... J'en restais bouche bée. Mais au sens littéral du mot. Si le bureau n'avait pas explosé, je serais bien resté accroupie dessus à le regarder se transformer en tas fumant. J'étais à la fois admirative et envieuse...

Mais alors qu'une partie de mon être perdait son temps à s'extasier devant cet exploit, l'autre bougeait toujours. Apparemment, mon cerveau et mon corps ne s'étaient toujours pas réconciliés et ne semblaient pas vouloir faire la même chose en même temps.

Seconde réaction :
Il s'était rapproché à une vitesse inconcevable pour un être humain. Ca me faisait apprécier ce bonhomme d'autant plus qu'il ne semblait pas décontenançable. Mais je me doutais bien qu'il allait attaquer. J'étais à une place de choix et il ne pouvait pas vraiment m'atteindre... Je le comprenais tellement. Il prit ses précautions, pour que je ne le touche pas du bout de mon rasoir, mais moi je n'avais pas envie de le frapper. J'avais commencé à bondir dès qu'il posa sa main sur le bureau. Mais où aller?

J'avais toujours eu un don pour escalader les endroits abrupts, tels que façades de bâtiments, armoires, lampadaires, lits superposés pour enfants... Alors je bondis sur l'armoire, grimpant en haut. Mais après cet objet, il ne restait pas beaucoup de perchoirs qui me permettraient de le rendre dingue. Le toit, peut-être.

- Pas si sûr que ça, mon grand.

Je jonglais avec mon rasoir, tenant entre le haut de l'armoire et le plafond par un miracle dont je me foutais véritablement.

- C'est sûr... Quand je t'aurais tué?

Et maintenant, j'avais plusieurs possibilités, maintenant qu'il était venu aussi. La première, descendre de moi-même, et quand il serait redescendu aussi, remonter, et redescendre, pour le rendre fou et le fatiguer, après, je n'aurais plus qu'à l'achever, et puis, ça m'aurait permis de bien rigoler... Sinon, je pouvais attendre sagement qu'il explose l'armoire, et me faire tabasser en le tabassant lui même... Mais j'avais une troisième solution, que je préférais de loin et qui consistait à...

FUI !!!
Je n'avais gardé mon bras qu'en me placant de tout mon corps contre le mur. J'avais des reflexes étranges... J'étais du genre à avoir un ange gardien (si j'en avais un, ce devait être Gabrielle, ma meilleure amie angélique, époque qui remontait à loin, loin loin...) du genre sadique : il me poussait dans les escaliers mais me donnait assez de reflexes pour me rattraper à la rampe... Mais alors que je remerciai cet ange, je vis apparaître une autre étincelle... Une lame qui refletait la lumière.

Mais je n'étais pas encore décidée à quitter le haut de l'armoire. Je l'aimais bien, cette planque, il ne m'en priverait pas. Ah ça, non! Alors je me baissais. Je m'applatissais contre le dessus du meuble et priait pour que son bras n'ait pas la fâcheuse idée de faire un tour vers le bas, et donc, vers ma tête. Je fus rassurée quand je vis qu'il ne traînait pas au dessus de moi.

Quand son bras avait enfin quitté l'espace au dessus de mon corps, je me relevais légèrement, resserais ma prise sur mon arme et bondis.C'était celle-là, ma solution de départ : lui sauter dessus, non pas pour le tuer, mais pour le faire tomber et tomber avec lui. Les débris qui traînaient par terre le blesseraient, et au sol, a priori, je serais sur lui, donc j'aurais l'avantage et je pourrais l'égorger d'un coup sec...

Notre petite séance de préliminaires avec moi qui le chevauchait sensuellement et lui qui se tordait de douleur amoureusement ne dura pas bien longtemps. Et tant mieux. N'oublions pas non plus que le fait de sentir mes cuisses autour de son ventre me donnait envie de lui vomir dessus tout mon dégoût des câlins, de la tendresse et de l'amour... et à la fois envie de le poignarder jusqu'à ce qu'il ait un gros trou dans le bide. C'était probablement à cause de ce dégoût que j'avais envie de me défouler sur lui... Et c'était certainement pour ça que j'étais célibataire depuis, disons... Toujours. Un toujours qui remontait depuis environ six moi avant ma mort.

Je n'oublierais jamais Angueron... Un amant fantastique. Beau habillé, beau nu, beau sous la couette, beau quand il se battait pour moi... Un sourire charmeur, des muscles d'acier, des vêtements taillés sur mesure... Un visage angélique, des doigts de fée, des traits fin, un grain de peau fantastique... Mais absolument rien dans la caboche. Si ça n'avait pas duré entre nous, c'était parce que je visais plus haut pour avoir des informations importantes, et que lui de son côté, regardait les autres ange avec désir et fougue. Ca m'avait vite blasé de lui... Mais si je devais le revoir, ce soir, je crois que je lui vomirais dessus (quoi que ce serait physiquement impossible, parce que j'aurais certainement déjà vomi sur mon nouvel amant et que comme je n'avais pas mangé depuis le midi...) et que je le tuerais.

Subitement, je sentis un mouvement, sous moi. Merde. C'était l'autre débile qui se faisait la malle d'entre mes jambes (hu hu que c'est délicat) parce que j'avais relaché ma garde une seconde de trop, le temps de me rappeller mes folies passées... Mes réflexes me lâchèrent une seconde et mon cerveau repris le service très vite : "Bon, Shem, tu te sors les doigts du cul, tu te lèves, tu sors ton rasoir, et tu l'exploses... L'heure tourne." Je jetais un infime coup d'oeil à l'horloge. Oh oui, l'heure tournait, il fallait faire vite.

- Pas mal... Tu es différente de tout ces crétins qui m'ont cherché des noises récemment...

Mais pourquoi il parlait l'autre abruti? Il ne connaissait pas les règles des combats ou quoi? Putain, mais un combat, c'est comme une partie de jambes en l'air : on se fait du bien, on se défoule, on fait mal à l'autre sans remarquer que l'autre souffre et surtout, surtout, on ne parle pas... Parler pendant le sexe, ça revient à roter dans un entretient d'embauche important... De quoi dégoûter l'autre... Mais bon, je n'allais pas le laisser s'en tirer à si bon compte. S'il en avait marre de mes coups, mes répliques allaient les lui faire regretter. Hé hé. Je répondais précipitament la première insulte qui me passa par la tête :

- J'existe? Hu hu.

Mais il continuait déjà, il n'était même pas drôle...

- Et si tu me montrais ce que tu sais faire d'autre?

Je ne lui répondais pas. Bien sûr que j'allais lui montrer. Déjà parce qu'il ne m'en laissait absolument pas le choix, après, parce que je mourrais (hu hu, le jeu de mots foireux) d'envie de l'exterminer... Une furieuse envie de le torturer, de lui arracher les yeux à la petite cuillère - même si dans son cas ce serait plus avec des débris traînant au sol... -, d'exposer son corps mort dans le QG de la résistance... Même si Seth me tuerait quand je l'aurais fait...

Ayu se précipita sur l'armoire puis sur moi et bien sûr, réflexe ou pas, je reculais. Autant dire que je ne faisais pas vraiment la fière, à moitié assomée sous un meuble qui devait peser une dizaine de kilos de plus que moi... Et puis ça faisait mal... Mais ça faisait mal lointain, la douleur m'atteingait mais... De loin... Comme si elle mettait un moment à restituer le message au cerveau... Je le vis s'approcher. Que faire? Me planquer sous l'armoire et le laisser m'écraser? Sortir de dessous l'armoire et le laisser m'égorger pendant ce temps...Si seulement il avait envie de me violer avant de me tuer, là, j'aurais uen chance... Mais bon.

Je décidais de sortir de sous le meuble... Je me débrouillais bien, j'étais rapide, sûre de moi, agile... Mais pas assez... Et bien sûr, j'avais la moitié du corps encore prisonnière quand il vint...

Le coup de pied dans la machoire venait de me confirmer que j'étais vaincue... Ce coup me fit bouger de quelques centimètres. Juste assez pour que je n'aie plus que les pieds coincés sous l'armoire. Mais ça, je m'en fichais. J'étais sérieusement sonnée. Les coups de pieds dans la tête, c'est pas mon truc de les recevoir. Pas mon truc du tout. Les donner, passe encore, mais les recevoir, non. Mais il était déjà revenu à la charge et m'écrasait la poitrine assez fort pour finir de me couper le souffle...

- Egorge moi, qu'on en finisse...

J'avais entendu ces mots, dans la pièce. Ma voix les avait prononcés, j'en étais sûre, mais je réalisais plus tard qu'ils n'étaient jamais sortis de ma tête... Je n'avais fait qu'entre ouvrir la bouche assez longtemps pour produire ce qui devait ressembler à un gargarisme étrange... Lui aussi, de son côté, semblait marmonner des choses. Je n'entendais pas (peut-être que j'étais devenue sourde, après tout, je venais de me prendre une armoire et un coup de pied dans la tete...) mais je voyais ses lèvres bouger...

Un sortilège...? Il était original mais un peu répétitif... Il utilisait la magie, toujours la magie... C'est bon coco on a compris avec ta magie, maintenant égorge moi qu'on en finisse... J'aurais voulu qu'il entende ce message mental que mon cerveau hurlait... La mort m'effrayait, bien sûr... Moi, j'avais vu ce qu'il y avait après la vie... Et je n'avais aucune envie d'y retourner, mais je me rendais bien compte que j'allais finir par le faire... Retomber sur les même atrocités affamées qu'à mon premier passage... Mais comme elles auraient goûté à ma chair une fois, elles seraient d'autant plus énervées de me revoir... Cette pensée qui me traversait l'esprit, en echo, un peu comme la douleur précédement, me fit avoir la chair de poule.

Mais il se mit à reculer de moi, plutôt que de se rapprocher et de m'achever. Que se passait-il? Qu'est-ce que j'avais encore fait comme connerie? Me connaissant, ou plutôt, connaissant ma veine légendaire, il devait y avoir une autre créature bizarroïde dans la pièce, qui allait me dévorer, puisque j'étais maintenue au sol par des lianes et que j'avais la tête qui me tournait et ainsi, l'autre aurait le temps de fuir, loin loin loin de la bête... Peut-être.

Mais j'inclinais la tête en arrière et ne vit rien d'étrange... Si, la pièce était étonnament à l'envers, mais en fait, au bout de quelques instants, je ne fus plus étonnée... Plus étonnée par ce détail. Non, j'étais à mon tour en proie à une interlocation (j'aime remanier les mots qui existent pour en faire des mots qui n'existent pas le moins du monde) de taille. Son sortilège ne marchait pas. Les liens disparaissaient allégrement. Tant mieux.

Je me dégageais rapidement les pieds de sous le meuble et je me remis debout du mieux que je pus. Je ne tenais pas vraiment sur mes jambes alors je du m'agripper à un recoin du bureau. Je me massais le crâne. Et soudain, une pensée me revint en mémoire. Mon rasoir... Où était ce satané rasoir? Je regardais à droite, à gauche et le vis par terre. Je regardais Ayu...Cet abruti était contre le mur... Si je bondissais assez vite je pourrais choper mon arme...

Et vous savez quoi? Le mieux dans cette histoire, c'est que je le fis.

Cette soiriée commençait à vraiment déconner. Mais j'avais besoin de faire une pause et de réflechir, pour une fois. Il fallait que je récapitule la situation... Kamui était parti en vacances et je n'avais pas pu le tuer... J'avais erré à la recherche d'une nouvelle proie, pour le remplacer... J'avais été jusque sur le port. Là, un type m'avait accosté et j'avais fait comme si j'étais une prostituée pour pouvoir le tuer... Il m'avait emennée dans un endroit que je soupçonnais être la Quartier Général de la Rebellion... Là, on avait commencé à se taper dessus... Et son corps venait de disparaître...

Mais qu'est-ce qu'il se passe, ici à la fin?! Je n'y comprenais plus rien. Il aurait pu me tuer, mais apparemment, ses dons avaient eu un problème... Et maintenant il avait disparu. C'était un fantôme? Non, je l'avais touché... C'était peut-être juste une illusion de mon cerveau malade... Mais pourtant, j'avais mal, donc sauf si je m'étais frappée toute seule, je n'avais pas rêvé. Je pensais alors que c'était un esprit, un peu comme moi, probablement.

Au bout de quelques longues secondes où je regardais dans le vide, je vérifiais l'état de mon corps. J'allais avoir un bleu à la machôire. Ja la bougeais, essayais de parler... C'était douloureux, mais je pouvais au moins parler correctement.

- Le salopard. Il aurait pu me laisser le tuer... Bon Shem, tu sors d'ici en vitesse et tu manges un truc.

J'enjambais les débris de l'armoire, déverouillais la porte. L'ouvrir légèrement, glissais la tête par l'entrebaillement, pour voir s'il y avait quelqu'un dans le couloir. À gauche, personne... À droite, un type au regard étrange qui me fixait... J'essayais un sourire amical. Et au fond, je n'avais plus la force de me battre ce soir. J'étais sonnée, je voulais dormir, manger un petit truc, être seule...

- Bonsoir...

J'aurais voulu jouer le jeu, faire croire que j'étais paumée... J'essayais, mais je savais que j'avais l'air trop épuisée pour être vraiment convaincante...

- Je euh... Suis un peu... Perdue...

- Oui moi aussi je me perds souvent dans des endroits dont je n'ai pas la clef...

Si j'avais été une fille normale, j'aurais baissé la tête, rougit et pris une mine désolée... Mais moi, je n'étais pas désolée et mes visage était probablement incapable de rougir... Je me contentais de le fixer. Une sacré coincidence... Moi, je n'ai jamais été une grande fanatique des coincidences... Je n'ai jamais vraiment été une grande fanatique de grand chose, en fait. Mais les coincidences, c'est le Mal. Avec un grand M, je vous prie. Des choses arrivent, sont liées, interfèrent entre elles et changent la donne. Et si pour le moment j'avais gagné, je ne tenais pas à ce que ce type change ma donne.

Sinon j'allais me facher très fort. Et quand je ma fâche très fort, c'est pas joli joli... La dernière à l'avoir testé avait osé me donner un coup de genou dans le ventre alors que je ne voulais que la tuer... Elle est morte de trente-six coup de couteau dans le coeur... Ses cris de douleur hantent encore mon être... C'que c'était bon!

-Vous vous êtes battue avec Ayu et je ne sais pas comment mais vous avez gagné, ce qui me fait une deuxième bonne raison de ne pas vous laisser partir...

Je plmantais mon regard rouge sanguin dans le sien. Une nuance de colère y traînait... Cette soirée commençait à m'agacer. Il connaissait Ayu, il savait, comment? Pourquoi? Je serais les dents, à m'en faire peter ma machoire légèrement rougie par le choc... Ce bleu, je ne pourrais l'oublier que quelques temps plus tard... Mais cet "Ayu" de mes deux, lui, il allait le sentir passer... Oh oui. Mais je me contenais encore.

- C'est bête... Si vous me laissiez partir, je pourrais peut-être me débrouiller pour vous apprendre.

Oh mon dieu, je ne savais pas pourquoi je disais ça. Mais ce qui était clair c'était que je me ventais... La colère fait faire des choses horribles, parfois. Mais je ne songeais plus. Je n'en étais plus capable... Entre la douleur causée par le coup de pied et l'armoire... Entre ma rage de ne pas avoir du sang partout sur moi... Entre ma frustration de ne pouvoir me barrer... Et le fait que Seth pouvait passer par là à tout moment... Je tournais le dos à ce nouveau type...

- Allez, bonne soirée et à bientôt, lançais-je en commençant à m'en aller, d'une voix acide.