Petite partie de chasse [18/04/13 - Nuit]

Une journée. La lune est à la même place qu'à mon éveil. Et j'ai toujours le même sourire au lèvre, celui qui m'a valu d'être qualifiée de "demeurée". Et lui a valu un simple haussement d'épaule. Mes pas m'ont conduit au hasard des rues, vers le centre ville. Je crois que c'est la mémoire d'une fillette, une gamine trop curieuse pour s'être effrayée de la chose, qui m'indique la route à suivre entre ces habitations hautes et ces rues qui se ressemblent toutes. Pour retrouver le centre d'une ville, suis toujours les plus grandes routes.C'est ce que j'ai fait.

Je trouve l'atmosphère de cette ville étrange. Beaucoup de gens marchent vite en regardant leurs pieds. D'autres avancent la tête haute, comme si le monde leur appartenait. Les gens qui marchent vite font des détours pour les éviter. Et tout le monde ignore le vieil homme qui tend les mains en implorant les passants. Je ne trouve pas que l'homme se sort grandi d'avoir inventé, colonisé le monde et découvert l'espace.

Avec la nuit, les rues se sont vidées. La plupart des gens sont rentrés chez eux ou dans des tavernes, d'où s'échappait de la musique. Enfin, ce que les gens appellent de la musique. Ca aussi, pour l'instant, je trouve que l'homme n'a pas à s'en réjouir.

Je sens l'asphalte sur mes pieds nus, alors que j'avance dans la fraicheur du soir. C'est étonnement plus doux et chaud que les routes boueuses et les pierres froides dont j'ai le vague souvenir. J'ignore si j'ai dépassé le quartier des tavernes, ou si elles ont fermés, mais je n’entends plus de bruits de conversations, de radio, ou autre. Pour autant, ce n'est pas désagréable. Je sens le vent dans mes cheveux, je l'entend s’engouffrer entre deux maisons. Et bien que la lune soit régulièrement cachée par des nuages, la lumière des lampadaires éclaire mon chemin.

J'en suis toujours là de mes découvertes, quand je sens une présence. J'ignore laquelle des mémoires s'est réveillée, mais je sais qu'il y a quelqu'un derrière moi. Et que sa main va abattre sur mon épaule. Mes souvenirs s'agitent, et j'ai une dizaine d'automatismes qui se proposent à moi, pour esquiver, ou retourner une prise potentiellement dangereuse vers mon adversaire. Je n'en fais rien. Ce n'est pas quelque chose de convenable.

Non, juste un pas sur le coté. Une épaule qui s’efface, et un léger demi tour pour me retrouver face à face avec le jeune homme qui m'approchait. En voilà un qui n'est pas un gentleman. J'aime bien ces coutumes de politesse que j'ai en mémoire sans jamais les avoir connu. Une évolution par rapport à chez moi, mais qui ne doit pas avoir fait long feu. Ou peut-être est-il trop jeune? Il a l'air d'avoir mon âge.

"Bien le bonsoir. Ne devrais tu pas être chez toi, à une heure pareille? Ta mère risque de s'inquiéter."

Il ne fait pas bon sortir la nuit, disait mère. C'est le domaine des fées et des korrigans. Plus grand monde n'y croit, mais ce n'en est pas moins vrai. Au moment cependant où mes mots sortent de ma bouche, je me rappelle que je ne suis pas plus âgée que lui. Et que si certes, je n'ai plus de mère pour s'inquiéter, et plus tellement l'âge de la pleurer, je reste moi aussi une proie facile pour les faës. Que la chose se fiche du jour et de la nuit ne signifie pas que tous sont pareils. Finalement... je devrais me taire.

marrant, j'ai pas reçu le mail de réponse... ^^" heureusement que je suis repassée sur la page d'accueil, sinon, j'aurais rien vu!]

Alors que je me faisais la réflexion que mes paroles pouvaient aussi s'appliquer à moi, ces mêmes mots semblent susciter de l'étonnement chez mon vis à vis. Aurais-je fait une erreur de langage? Non, pourtant. Ma mémoire me confirme que "mère" est bien le mot signifiant "maman" dans la langue que j'entends depuis ce matin. A moins qu'il n'aie changé depuis? Où qu'il ne parle pas cette langue.

Visiblement, si, il parle cette langue, puisqu'il me répond. Sa manière de parler sonne différemment de la mienne à mes oreilles, mais peut-être est-ce moi qui exprime cette légère dissonance, ce fable accent.Il aime se promener la nuit, hein? Mes lèvres dessinent un sourire poliment amusé, tandis que je replace une mèche imaginaire derrière mon oreille. Alexis, hein? C'est un beau prénom. Et il se promène, de nuit, oui, elle avait compris la première fois.

"C'est un beau prénom. Un prénom de guerrier, si ma mémoire ne me fait pas défaut. Pour ma part, mes parents m'ont nommé Abbigail, enchantée."

Bien sur, ma mémoire n'a pas de raison de me "faire défaut". C'est juste que je me souviens que les hommes sont toujours content quand on leur fait un compliment. Les femmes aussi d'ailleurs, mais pas de la même manière...

"Méfiez vous cependant. La nuit est le domaine des faës, esprits et korrigans. Et ces demoiselles n'apprécient que rarement d'être abordées si peu cavalièrement. Je trouverai dommage qu'elles ne vous jouent un cruel mauvais tour parce que vous les aurez abordées. Ou simplement parce qu'elles s'ennuyaient."

A la fois une remontrance pour tout à l'heure, et un avertissement pour ce poète des temps moderne. Les faës peuvent être bien vilaines. A mon époque, on ne les nommaient pas. Mais finalemnt, je doute qu'une d'elle apparaisse. Aucune de mes mémoires n'en fait mention autrement que comme des contes de bonnes femmes, mais bon. Je continue d'y croire.

"Bien sur, je n'en fais pas partie, ou vous danseriez déjà jusqu'à l'épuisement, mais..."

Je ne finis pas ma phrase. Si ça se trouve, lui non plus n'y croit pas. Sinon, il se serait déjà méfié, non? Je suis pieds nus, de nuit en robe blanche. Combien de contes commencent ainsi? Celui de la Teughia, ou de la fausserole, de la dame blanche ou des lavandières? Celui des fileuses de pierre? Et combien finissent bien pour le jeune homme trompé? Bien peu. Alors non, il ne doit pas y croire non plus. Donc pourquoi je m'embette?

Il n'aimait pas danser. Sans blagues. Qui voudrait danser jusqu'à en mourir? Ma gorge émet un léger rire. Probablement pas un trucs pour lui faire plaisir, j'ai l'impression qu'il se méfie de moi. Parce que je le me en garde? Oh. Parce que je n'ai pas l'air de les craindre, hein? Le pauvre, il est tout tendu... Il n'a pas tord de le remarquer. Après tout, ça ne fait que 24 heures que je suis sortie de la Chose. J'ignore encore tout des dangers de ce monde. Quand j'étais enfant, on craignait les loups, les feës, les trolls et les ogres. Et aujourd'hui? Que craignent-ils?

"Démon?"

C'est ce qu'ils craignent? Ou c'est ce qu'il pense que je suis? Je sais ce que c'est. C'est la dernière pensée qu'avait eu le moine, en voyant la Chose. Et moi, est-ce que je suis un démon? Les démons sortent de l'enfer, et je n'en ai pas l'impression. C'était long, mais... Je "dormais" la plupart du temps. Et je ne crois pas y ressembler. Je pose légèrement ma main sur mon front pour vérifier... Non, c'est ça, j'ai pas de cornes. J'ai pas d'ailes, ça, je le sentirai, et je ne sens pas non plus de poids plus bas dans mon dos. Pas de queue non plus... Bon, en y réfléchissant, la Chose avait rien de tout ça... Alors peut-être que je me trompe dans la définition?

"Je ne sais pas ce qu'est un démon. Mais je pense avoir moins à craindre des faës que toi. J'ai été bercée de leurs histoires."

Je sais qu'il ne faut pas s'approcher d'un cours d'eau, ou d'un lavoir, où d'une route des feys, passé le milieu de la nuit. Je sais comment tuer une Laume. Qu'il ne faut jamais entrer dans un cercle, toutes ces petites choses qu'à mon époque, le voyageur prudent connaissait. Bon, je crois aussi que la plupart des gens évitaient de trop voyager de nuit.

"Mais on dirait que ces histoires sont obsolètes, à en juger par ton étonnement? N'as tu jamais entendu parler de la groach, des ogres sous les ponts, des lavandières, ou des cercles de danses?"

Juste pour confirmer. Et s'il répond non, c'est que... soit c'est un sot ignorant, ce qui est possible. Après tout, c'est le premier être humain avec qui je parle peut-être que les autres connaissent les feys. Soit c'est que les feys ont sombré dans l'oubli, et qu'il y a d'autres choses à craindre. Et dans ce cas, je suis l'ignorante, et il serait peut-être préférable que je me renseigne. Au cas où.

Les ogres ne sont plus que des contes qu'on sert aux enfants. Je m'en doutais. Il en est probablement de même pour les feys, mais les esprits? Comment se fait-il qu'il croie encore aux esprits, et pas aux feys? Mes sourcils se froncent légèrement devant l’incongruité de cette remarque. Définitivement, le monde à changé, depuis la dernière fois que j'ai eu de ses nouvelles. Voyons... Les feys sont devenues des créatures de fiction, ça je le savais. L'imaginaire à gardé en mémoire de gentilles femmes aux ailes de papillons, et oublié la plupart des autres. Et le fait qu'une fée n'est pas toujours gentille...

Et puis il y a eu l'interrogation de tout à l'heure... sur les démons... Est-ce qu'ils seraient sortis des... enfers? C'est pas supposé figurer le jugement dernier ou la fin du monde ou je sais plus quoi, ça?

Non, je sais pas où je me trouve, en effet... Mais euh... ça importe à ce point? Le monde entier n'est pas touché? Je veux dire, je doute qu'il y aie des démons aux... états unis, et des esprits à Rome, si? Comme les humains ont construits des pays?

Je crois que je m'égare, là. Je ne connais pas la situation, et extrapoler ne m'aidera pas. Je réponds donc à la question, même si cela fait déjà au moins trois secondes qu'il me l'a posée.

"Je sais que nous sommes à Heaven. Je l'ai lu dans le journal. Mais j'ignore où cela se trouve, ni le rapport avec les esprits et les démons".

Autant jouer cartes sur tables. Je me dit que c'est le meilleur moyen d'avoir des réponses.

Triste? Je respire, je peux voir les étoiles... Honnêtement je ne me sens pas vraiment triste. Pendant qu'il réfléchit, je m'assoit sur le rebord du trottoir, et je regarde le ciel, bien différent de celui que je connais. Les immeubles autour forment des ombres étranges, et on ne voit que peu d'étoiles. Il me parle de l'anormalité de la ville. Déjà qu'elle me semblait étrange... Faudra que j'aille voir une ville normale, pour comparer. Des esprits... des fantômes? Comme moi, dans la caverne? Des changeurs de formes. Ca doit être intéressant. Des descendants des feys? Je me souviens d'avoir entendu dire que les feys remplaçaient souvent les enfants humains par des leurs. ou pars leurs batards demi sang. Et que ces changelins ont de la magie dans les veines...

"C'est possible..."

Ma voix est un peu lointaine, je me perds un peu trop dans mes réflexions. Et puis... Il y a la "découverte" que le matériel du trottoir est différent de celui de la chaussée. Ils laissent une impression différente sous mes doigts et sous mes pieds nus. Je me demande si j'aurais assez d'une vie pour voir tout ce qui a changé.

Humaine? Euh... J'en doute. Après tout, je n'ai jamais entendu parler d'une humaine au sang rouge pâle. Ni d'un humain mort revenant à la vie. Mais pour autant, je ne sais pas ce que je suis. Et puis...

"Est-ce si important, si je l'ignore? Es-tu humain, toi?"

Après tout, il a vraiment l'air d'y tenir, à savoir ça. C'est peut-être une question d'usage, ici, après le nom et le prénom... M'enfin, je ne vais pas l'attaquer, non plus! J'ai des manières... Alors que je m'apprête à le rassurer sur ce point, il reprend la parole. Et j'éclate de rire. Qu'est-ce donc que ce marché?! Sa protection contre "quelque chose"?! Accepter un marché comme ça, c'est courrir le risque qu'il ne puisse être remboursé!

"Il est définitivement heureux que tu ne connaisse les feys. Un tel marché avec eux, et tu serais payé, pour ton aide d'une motte de terre ou tout autre "quelque chose" qu'ils trouveraient. Mais pourquoi ne pas simplement se promener? Tu me fais découvrir la ville, et en échange, sitôt mes marques prises, je te rendrai service quand tu auras besoin, autant de temps qu'aura duré notre balade."

Déjà, là, ça me semble équitable... un peu plus, du moins.

Est-il humain? A mes yeux, il y ressemble... En totalement inconscient, puisqu'alors qu'il m'explique que la ville est dangereuse de nuit, il s'y promène aussi. Moi, j'ai l'excuse de l'ignorer, mais lui?

"De mes souvenirs, je pensais que les humains avaient peur de ce qu'ils croisent la nuit... Soit tu es inconscient, soit tu sais que tu n'as rien à craindre."

Je penche pour la seconde proposition. Encore que, son insistance à vouloir savoir si je suis un démon... Enfin, je m'en fiche. Il peut être ce qu'il veut, je ne crois pas que ça change grand chose: il ne m'attaquera pas, il vient de me faire une proposition d'alliance...

Bien sur, pour lui qui ne comprends rien aux feys, mes propos sont dénués de sens. Et c'est sur que, entre un démon qui veut vous manger (sans façon, merci) et un fey qui se fiche de vous, le plus dangereux est à mon avis aussi le démon. C'est inquiétant comment je me sens décalée, d'un coup. M'enfin, j'ai presque un millénaire de retard... Il poursuit. Me propose de me faire visiter, avant que le jour ne se lève. Pourquoi avant? Il a peur de la lumière, ou quoi? Je crois me souvenir vaguement d'un truc, qui brille au soleil... Les vampires... Il a peur de briller au soleil? Bah, je verrais.

"Pourquoi ne pas commencer par là où nous sommes? Où se situe Heaven? Qui la peuple?"

C'est ce qu'il y a de plus simple, non? Par contre, je devrais peut-être lui laisser le temps de répondre. Ce serait plus facile. En même temps que je pose mes questions, je me suis relevée, prête à le suivre dans cette promenade en ville.

(Pitié le vampire qui brille c'est juste à vomir T_T)

(c'est pas ma faute euh ♪ c'est juste que... J'ai des sorces limités!)

Est-ce que je suis perdue à ce point... Oui. Mais vu que déjà ça à l'air de le choquer, j'vais éviter de lui demander si la france est bien ce qu'à mon époque on appelait la gaule... Tant pis pour la vérification de mes souvenirs. Mais s'ils sont exacts, nous devrions être à l'est de chez moi. Je crois.

Les trucs qu'on rencontre dans les bouquins... Alors, j'ai pas visité beaucoup de livres de mon vivant, mais pas sure qu'on y croise autre chose que des mots. Bref. Les démons... Me rappelle bien ce que c'est. Les images tirées de la mémoire du moine font état de trucs gigantesques avec des ailes noires...franchement moche et pas discret. Des esprits. Ca, je connais un peu. Combien de fois ai-je entendu leurs cris sur la lande? Visiblement, ici, il ne reviendraient pas qu'à Sahmain. Quand aux vampires... La seule chose que ça m'évoque, c'est la mémoire de l'adolescente. Un beau garçon qui court vite et brille au soleil. Je vois pas en quoi c'est dangereux, mais je suppose que me mémoire est... incomplète. Probablement que la demoiselle n'avait jamais rencontré de plus dangereux qu'un hérisson avant de tomber sur la Chose. Elle m'avait l'air d'en savoir assez peu sur le monde.

Par contre, c'est moi où il a hésité avant de les mentionner? Tout en le suivant, je compile les informations dont je dispose.

"Si les illustrations que j'ai vue sont véridique, les démons doivent être assez peu discrets, non? Les ailes ne doivent pas être facile à camoufler."

A aucun moment ne me vient l'idée qu'ils puissent se camoufler.

"Quand aux vampires... S'ils brillent bien le jour, ils doivent être assez remarquables, eux aussi, non?"

Ou comment insulter toute une race par pure innocence...